Calculez vos allures en fonction de la chaleur - Calculateur & explications 🥵
- Simon Tissier
- 13 juin
- 10 min de lecture
Dernière mise à jour : 20 juin
L'été est là et la hausse des températures avec : premières sorties écourtés, FC qui s’emballe et chronos qui s’allongent – nos athlètes Ibex en font l’expérience dès ces premiers jours d’été.
Pour savoir exactement à partir de quel degré la chaleur plombe vos allures (et de combien), nous avons décortiqué pour vous l’étude de Mantzios et al. (2022) portant sur l'analyse de 1258 courses internationales , 7867 chronos corrélés minute par minute aux conditions météo (température, humidité, rayonnement, vent) via la ré-analyse ERA-5.
Dans cet article, on transforme ces données en informations concrètes :
zone thermique “idéale” pour performer ;
pénalité par degré dès qu’on sort de cette zone ;
protocoles d’acclimatation chaleur faciles à insérer dans votre planning ;
tableau d’ajustement d’allure pour 5 km, 10 km et marathon ;
check-list hydratation & refroidissement signée Ibex outdoor.
Calculez vos allures en fonction de la température avec le calculateur Ibex :

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1. Contexte de l’étude
Réchauffement climatique faisant, les températures estivales ne cessent d'augmenter ; or les données scientifiques quantifiant l’impact réel de la chaleur sur la performance restaient éparses, souvent limitées à une course ou une saison.
Cependant, l’équipe de Mantzios et al. (2022) a voulu combler ce vide en combinant deux sources de référence :
Les résultats officiels de 1 258 finales internationales (Jeux olympiques, championnats du monde, championnats continentaux) disputées entre 1936 et 2019, couvrant le 5 000 m, le 10 000 m, le marathon et la marche 20/50 km – soit 7 867 chronos d’athlètes élite.
La ré-analyse météorologique ERA-5* qui fournit, heure par heure et à l’endroit précis de chaque course, température de l’air, humidité relative, vent, rayonnement solaire et pression atmosphérique. À partir de ces variables, les chercheurs ont calculé le Wet-Bulb Globe Temperature (WBGT), l’indice qui synthétise le stress thermique ressenti par le coureur.
*ERA-5 : base de données météo du Centre européen ECMWF qui « rejoue » l’atmosphère heure par heure depuis 1979, en fusionnant toutes les mesures disponibles avec un modèle global (~30 km de résolution). Idéal pour connaître, a posteriori, la température, l’humidité, le vent ou le rayonnement lors d’une course.
En modélisant la relation temps de course ↔ WBGT pour chaque discipline, ils ont pu déterminer :
La zone climatique « idéale » où la performance est maximale (10 – 17,5 °C d’air / 7,5 – 15 °C WBGT).
La pénalité précise (- 0,3 à - 0,4 % par degré) dès qu’on s’éloigne de cette fenêtre, en chaleur ou en froid.
La part relative de chaque facteur météo (température, humidité, vent, rayonnement) dans la dégradation de la performance.
C’est sur cette base solide, statistiquement inédite par son ampleur historique et mondiale, que nous avons bâti les recommandations qui suivent : ajustement d’allure, protocoles d’acclimatation et stratégie d’hydratation pour affronter les premières chaleurs de l’été sans laisser vos chronos fondre au soleil.
2. Effets précis des paramètres météorologiques sur la performance
2.1 Quelle variable pèse le plus lourd ?
Les auteurs ont entraîné des arbres de décision (jusqu’à 4 niveaux) capables de prédire la baisse de performance à partir des quatre variables météorologiques mesurées (température, humidité relative, rayonnement solaire, vent). Quand toutes les disciplines sont analysées ensemble (R² = 0,33) :
Rang | Variable | Score d’importance |
1 | Température de l’air | 40 % |
2 | Humidité relative | 26 % |
3 | Rayonnement solaire | 18 % |
4 | Vitesse du vent | 16 % |
À retenir : la température domine, mais l’humidité et le rayonnement complètent un tiers de l’explication — d’où l’intérêt du WBGT, qui les agrège.
2.2 Modèle « simple température » vs « WBGT »
Un arbre utilisant uniquement la température donne des R² de 0,04 à 0,34 selon la discipline.
Le même arbre basé uniquement sur le WBGT monte à 0,11 – 0,47.
👉 Le WBGT reste donc deux fois plus prédictif que la température seule pour estimer la perte de performance.
2.3 Seuils critiques et pente de pénalité
Zone optimale confirmée : 7,5 – 15 °C WBGT (≈ 10 – 17,5 °C air).
Zones critiques :
> 15 °C WBGT (ou > 17,5 °C air)
< 7,5 °C WBGT (ou < 10 °C air)
En dehors de cette fenêtre :
Discipline | Pénalité / +1 °C chaleur | Pénalité / –1 °C froid |
50 km marche | +1,1 % | +0,5 % |
20 km marche | +0,4 % | — |
Marathon | +0,2 % | +0,1 % |
10 000 m | +0,04 % | — |
5000 m | +0,3 % | +0,2 % |
Événements les plus vulnérables : 50 km > 20 km marche > marathon.Le 3000 m steeple n’a pas été modélisé (critère de fit non atteint).
2.4 Performance « stressée » illustrée (marathon)
L’algorithme fournit une carte pénalité : à PB 3h00, courir par 28 °C WBGT coûte ~ 5 min ; par 5 °C WBGT, ~ 2 min.

En résumé : la température reste la variable reine, mais l’humidité et le rayonnement solaire expliquent près de 45 % du déclin ; d’où la supériorité du WBGT. La pente de ralentissement diffère fortement selon la distance – et devient redoutable au-delà du marathon-type.
3. Effets physiologiques de la chaleur : que se passe-t-il ?
Quand la température grimpe, l’organisme détourne le sang des muscles vers la peau pour évacuer la chaleur. Ce redistribution sanguine, additionnée à une sudation accrue, réduit le volume plasmatique ; le volume d’éjection chute, la fréquence cardiaque dérive vers le haut et la VO₂ max peut baisser de 5 – 10 % après à peine dix minutes d’effort continu sous la chaleur. Autrement dit : il faut « pousser » plus fort pour courir à la même allure.
Dès 1,5 – 2 % de perte de masse corporelle par déshydratation, la température centrale grimpe d’environ 0,15 °C par % manquant, la perception d’effort augmente fortement et la puissance décroît. Sans réhydratation adéquate, le corps choisit de préserver la thermorégulation plutôt que la performance : ralentissement quasi garanti.
Au-delà d’≈ 39 °C de température interne, le système nerveux central se met en mode protection : l’activation motrice volontaire diminue, la force max chute, l'allure cible devient intenable – c’est la fatigue centrale induite par l’hyperthermie.
Sur le plan métabolique, l’hyperthermie et la déshydratation accélèrent l’usage du glycogène, élèvent le lactate et abaissent le pH musculaire ; la fatigue périphérique survient alors plus tôt.
4. Impact prévisible de la chaleur sur vos chronos
4.1 Hypothèses
Pentes tirées de Mantzios et al. pour le 10 km (-0,04 %/°C) et le marathon (-0,20 %/°C).
Extrapolation proportionnelle à la durée pour VMA, Seuil 20′ et semi-marathon.
Effet linéaire simplifié, valable entre 15 °C et ~25 °C ; au-delà, la dégradation peut s’accentuer davantage.
Effort (durée-repère) | + 2 °C | + 4 °C | + 6 °C | + 8 °C | + 10 °C |
VMA 6 ′ (test 6 min) | - 1 s | - 1 s | - 2 s | - 2 s | - 3 s |
Seuil / SV2 (20 min) | - 5 s | - 10 s | - 14 s | - 19 s | - 24 s |
10 km (40 min) | - 2 s | - 4 s | - 6 s | - 8 s | - 10 s |
Semi-marathon (1 h 30) | - 16 s | - 32 s | - 49 s | - 1 min 05 s | - 1 min 21 s |
Marathon (3 h) | - 43 s | - 1 min 26 s | - 2 min 10 s | - 2 min 53 s | - 3 min 36 s |
(baseline : conditions “idéales” ≈ 15 °C ; pénalité moyenne constatée dans l’étude Mantzios et al., 2022)
4.2 Impact sur l’allure (min/km)
Surplus de température | 10 km (RP 40:00 / 4:00 min/km) | Marathon (RP 3 h00 / 4:16 min/km) |
+ 2 °C | Temps : 40:02 Allure : 4:00 min/km | Temps : 3 h 00:43 Allure : 4:16 → 4:16 min/km |
+ 4 °C | 40:04 → 4:00 min/km | 3 h 01:26 → 4:17 min/km |
+ 6 °C | 40:06 → 4:00 min/km | 3 h 02:10 → 4:19 min/km |
+ 8 °C | 40:08 → 4:00 min/km | 3 h 02:53 → 4:20 min/km |
+ 10 °C | 40:10 → 4:01 min/km | 3 h 03:36 → 4:21 min/km |
À retenir
Sur 10 km, la pénalité reste quasi imperceptible jusqu’à +8 °C ; elle atteint ~1 s/km à +10 °C.
Sur marathon, chaque +2 °C au-delà de 15 °C ajoute ~1 s/km : votre allure passe de 4:16 à 4:21 min/km avec +10 °C.
Ces estimations reposent sur les pentes de ralentissement mesurées par Mantzios et al. (2022) : −0,04 %/°C pour le 10 km et −0,20 %/°C pour le marathon.
5. Analyse concrète sur un test VMA
Contexte :
Romain débute son suivi chez Ibex, et comme chaque début de suivi un test est réalisé afin d'évaluer sa VMA et sa FCmax.
Ce test a été réalisé à Annecy, à une température extérieure de 32°C et un taux d'humidité de 49%
Cet hiver, Romain avait réalisé une préparation 10km avec pour valeur de VMA 18km/h soit 3:20/km.
Le test proposé est un 1/2 Cooper, soit 6' à RPE 10/10 afin de faire la plus grande distance possible, ici, sur piste.
Le résultat de ce test est de 1700m soit 17km/h de VMA.

5.1 Calcul du WBGT — mode « smartphone » en deux étapes
Même sans capteurs spécialisés, on peut estimer un Wet-Bulb Globe Temperature (WBGT) assez précis pour ajuster les allures. Deux données suffisent : température de l’air ( T , °C) et humidité relative ( RH , %). La formule simplifiée de Liljegren et al. (2008) convertit ces valeurs.
Étape 1 : convertir l’humidité en pression de vapeur
e = (RH / 100) * 6.105 * exp( (17.27 * T) / (237.7 + T) )
Étape 2 : calculer le WBGT extérieur (plein soleil)
WBGT = 0.567 * T + 0.393 * e + 3.94
Glossaire des valeurs utilisées
Symbole | Nom complet | Unités | Rôle dans le calcul |
T | Température de l’air (thermomètre sec) | Degrés Celsius (°C) | Mesure la chaleur « brute » de l’air ambiant, relevée à l’ombre et à 2 m du sol. |
RH | Humidité relative | Pourcentage (%) | Indique la part de vapeur d’eau contenue dans l’air par rapport au maximum qu’il pourrait contenir à la même température. |
e | Pression de vapeur de l’eau | Hectopascals (hPa) | Quantifie la quantité absolue de vapeur d’eau ; plus l’air est humide, plus e est élevé. C’est la valeur intermédiaire que l’on calcule avant le WBGT. |
WBGT | Wet-Bulb Globe Temperature | Degrés Celsius (°C) | Indice composé qui combine chaleur, humidité et rayonnement pour estimer le stress thermique ressenti par le corps humain. |
Exemple appliqué au test de Romain
Données brutes :
T = 32 - température de l’air en °C
RH = 49 - humidité relative en %
D'après les formules précédentes :
e = 0.49 * 6.105 * exp(17.27*32 / (237.7+32)) ≃ 23.3 hPa
WBGT = 0.567*32 + 0.393*23.3 + 3.94 ≃ 31.0 °C
Cette méthode « deux valeurs, deux équations » fournit en moins d’une minute un WBGT fiable à ± 1 °C — précision amplement suffisante pour appliquer les coefficients de ralentissement ou décider du report d’une séance clé par forte chaleur.
5.2 Analyse
Élément | Valeur | Commentaire |
Distance parcourue | 1 700 m | 1,7 km en 6 min |
Vitesse moyenne | 17,0 km/h (3’32/km) | — |
Conditions météo | 32 °C — 49 % RH → WBGT ≈ 31 °C | soit 16 °C au-dessus de la zone idéale (15 °C) |
Pénalité chaleur théorique | −0,35 %/°C × 16 °C ≈ −5,6 % | d’après Mantzios (épreuves 5–10 km) |
VMA « tempérée » estimée | 17,0 km/h ÷ 0,944 ≈ 18,0 km/h | valeur attendue ≤ 20 °C |
VMA hivernale (réf.) | 18,0 km/h | aucune baisse réelle |
Part imputable à la chaleur | ≈ 1,0 km/h (5,6 %) | la quasi-totalité de l’écart observé |
Sous 32 °C, Romain maintient 17 km/h ; une fois la pénalité thermique (~ 6 %) retirée, sa VMA remonte à 18 km/h, exactement son niveau hivernal. La chaleur explique donc presque toute la différence ; le léger reste (0,2 km/h) peut provenir d’un “désentraînement” de trois mois sans travail VO₂/VMA. Un nouveau test par temps < 20 °C, suivi d’un court cycle d’acclimatation, suffira à valider la VMA et à sécuriser les allures estivales.
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Références :
Impact des conditions météorologiques sur les performances :
Mantzios K., Ioannou L. G., Panagiotaki Z., Flouris A. D., & Kenny G. P. (2022). Effects of Weather Parameters on Endurance Running Performance: Discipline-specific Analysis of 1 258 Races. Medicine & Science in Sports & Exercise, 54(1), 153-161.
Effets physiologiques de la chaleur : que se passe-t-il ?
González‐Alonso J., Calbet J.A.L. (2003). “Reductions in systemic and skeletal muscle blood flow and oxygen delivery limit maximal aerobic capacity in humans in the heat.” J Physiol, 552(1), 281-290.
Cheung S.S., Sleivert G.G. (2004). “Multiple triggers for hyperthermic fatigue and exhaustion.” Exerc Sport Sci Rev, 32(3), 100-106.
Sawka M.N. et al. (2015). “Integrated physiological mechanisms of exercise performance, adaptation, and maladaptation to heat stress.” Compr Physiol, 5, 193-230.
Nybo L. (2012). “Brain temperature and exercise performance.” Exp Physiol, 97(3), 333-339.
Nielsen B. et al. (1993). “Cardiovascular and thermoregulatory responses during exercise…” J Appl Physiol, 75, 258-264.
Casa D.J. et al. (2010). “National Athletic Trainers’ Association position statement: Fluid replacement.” J Athl Train, 45(3), 385-392.
Périard J.D., Racinais S., Sawka M.N. (2015). “Adaptations and mechanisms of human heat acclimation.” Scand J Med Sci Sports, 25(Suppl 1), 20-38.
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